mardi 8 juin 2010

veille ou espionnage ? entout cas, réel besoin de formation des bibliothécaires...


"J'ai une approche strictement pragmatique et j'utilise le meilleur service disponible pour rendre le meilleur service possible à mes "clients", les usagers de ma bibliothèque. Pour cela, je me trouve vers les structures dont je suis moi-même client. Si le service n'est pas là, je vais voir ailleurs." écrivait dbo en réponse à B. Strainchamps qui appelait les bibliothécaires à une pratique éthique de catalogage.


Il n'est pas rare de rencontrer des bibliothécaires qui ne comprennent pas que comme on achète on vote. Peut-être sous estiment-ils le poids économique de leurs décisions et sont-ils inconscients de la formidable possibilité que s'est réservé l'Etat en matière de remise (la remise aux collectivités peut aller jusqu'à 15%, dont 6% est reversé par le libraire au titre du droit de prêt) ... à grands moyens, grandes responsabilités : cette possibilité de remise exceptionnelle ne devrait pas mener à une politique prédatrice d'achat faisant primer uniquement l'appât du gain financier à court terme et du confort personnel, en oubliant le gain social de l'achat local et/ou de l'achat sensé.


Finallement, cette tension libraire/bibliothécaire revient régulièrement, notamment parceque les libraires "traditionnels" ne proposent pas toutes commodités de fonctionnement dont ont besoin les bibliothécaires (mais besoin juqu'à quel point?) .
Je crois notament que si un bibliothécaire vient me demander de l'aider à constituer une bibliographie de livres à acquérir pour un rayon, il risque de passer un sale quart d'heure si je comprends qu'il n'a pas l'intention de commander chez moi et qu'il se servira de mon travail pour faire ses achats ailleurs... j'adore échanger à propos de mon fonds spécifique, accompagner des lecteurs dans leurs découvertes, mais pas s'ils se servrent de moi pour systématiquement acheter auprès de la concurrence, quand même !!

J'aurais donc pu sérieusement botter les fesses de Sophie la DLH si je l'avais prise en flag en train de photographier mes livres à la pelle ou Silvère Mercier... et qu'est-ce que ça va être quand ils auront automatisé la chose en cachette dans mes rayons ! La photographie volée de mes référence est-elle un espionnage commercial quand il n'y a pas de projet de relation commerciale de la part de "l'espion"?? Comment faire payer aux bibliothécaire cette vielle informative que permettent nos rayons et nos livres papier? Les bibliothécaires pensent-ils que la librairie est un service public?


Je propose souvent aux clients (ceux qui achètent régulièrement) un service "à l'ancienne", mais bien pratique : ils font une pile avec les livres qui les intéressent, pour que je leur envoie par mail la liste des code barres des références dans un format qui leur convienne. Mais les bibliothécaire en mission de veille, auraient-ils acheté ces livres dans ma librairie si je leur avais fourni ce service? Sûrement pas, leur politique d'achat ne valorisant pas le potentiel de veille que représente mon rayon et mon savoir faire. Renseigner, transmettre l'envie oui, faire un transfert de compétence sans contrepartie financière, non, il faut pas abuser. Comme quoi, malgré ce qu'écrivait sûrement sincèrement dbo , même si le service est là on va voir ailleurs car le problème est plus compliqué que la satisfaction des besoins.

Mettons nous donc dans la peau des bibliothécaires et essayons de comprendre comment ils peuvent payer ce service qu'ils apprécient et qu'on peut développer pour les aider à bien travailler leurs fonds : proposons des formations par exemple, en permettant à nos libraires de devenir experts reconnus sur certains domaines. C'est d'ailleurs ce qui fait vivre certains libraires spécialisés (mais pas salariés en général...). Investissons dans des douchettes autonomes gracieusement prêtées aux bibliothécaires en compte à partir d'un certain montant, lors de leur visite à la librairie, permettant au libraire de transmettre la liste des références en format importable.
Beaucoup de choses sont à inventer ensemble, mais ce n'est pas facile car peu de libraires sont aussi geek que les bibliothécaires et encore moins peuvent trouver plus de 10mn d'affilée derrière leur ordinateur : ils ne peuvent pas acquérir certaines connaissances en développements informatique qui leur permettraient d'être réactifs sur ces sujets...
Mais la question des opportunités extras que donnent les terminaux mobiles dans cette contrainte de rythme de travail saccadé des libraires , ce sera pour une prochaine fois où je parlerai de l'internet way of bookselling...

9 commentaires:

Bibliobsession a dit…

Très étonné par ce billet qui oppose inutilement les bibliothécaires et les libraires... quand vous écrivez "La photographie volée de mes référence est-elle un espionnage commercial quand il n'y a pas de projet de relation commerciale de la part de "l'espion"??" Excusez-moi mais je trouve ça délirant ! Tout ça n'a bien entendu rien à vois avec la notion d'espionnage et vous ne détenez aucun droit sur un fonds que vous vendez, contrairement aux ayants-droits... soyons plus sérieux comme vous l'êtes la fin du billet qui est plus positive. Je pense que si vous arrivez à prendre en compte qu'il s'agit là d'un besoin vous pourrez en faire un avantage concurrentiel (qui peut être valorisé dans le cadre des marchés publics on ne choisit pas librement d'acheter chez un tel ou un tel hein !) au lieu de vouloir nous "botter les fesses", ce qui soit dit en passant peut faire relativement mal. ;-)

Mlle F. a dit…

Ceci n’est pas inutile mais c’est sûrement délirant ;-) Beaucoup de choses nous rassemblent mais certaines attitudes nous opposent, c’est normal nous ne faisons pas le même métier, au lieu de le nier, comprenons-le et dépassons le. L’agacement devant une pratique est pour moi un indice qu’il y a quelquechose à inventer de notre part (et non pas à constater en râlant. On ne va pas non plus laisser dans l’indifférence notre capacité prescriptrice profiter systématiquement à un autre point de vente)

Vous avez vraiment
cru que je traitais les bibliothécaires d'espions au pied de la lettre???? mince alors ! Je force le trait pour faire comprendre que je peux être agacée de voir des gens en librairie qui me font faire leur bibliographie en me demandant conseil ou en notant mes choix de mises en avant pour acheter ailleurs, un ailleurs qui ne propose pas ce service et ce savoir mais qui aura cette vente quand même. (Je ne parle pas des gens qui vont emprunter les livres conseillés pour les emprunter, le conseil crée une relation qui nous bénéficiera surement le jour ou la personne décidera d’acheter… de toute façon il faut développer la lecture pour avoir des clients, c’est évident)

Il n’est pas du tout question de « droit sur les fonds » dans le billet, prenez autant de photos de livres que vous voulez ! Vous décrivez qu’il y a un réel intérêt à venir en librairie. Ceci est une chance pour nous. Mais il est question de notre savoir-faire à proposer un assortiment qui fait sens dans la production abondante, notre capacité d'appariement. Comment le faire valoir commercialement ? Et c’est bien ça qui est en jeu et qui est impalpable, difficile à faire valoir et à monétiser, et qui est la marque de fabrique d’un bon rayon… quand paradoxalement un critère très couru dans les marché publics peut être « combien de tires proposez-vous en magasin ?» alors même que le besoin du bibliothécaire n’est pas dans la quantité mais surtout dans la prescription. Bref, on ne va pas refaire l’histoire de la dérive de critère qui ont éloigné des librairies des marchés et que nous nous employons tous à pallier.… on pourrait imaginer faire payer un droit d’entrée dans la librairie pour rémunérer le travail d’assortiment qui permet au bibliothécaire de faire une bonne recherche bibliographique gratuite sur place (mais non , je blague, c’est pas un article d’Emmanuel Pierrat sur l’espionnage détendez-vous)

De façon générale je suis contre l'agacement au travail, on fait tous un métier de passion peu payé, alors si en plus on s'amuse pas au travail et qu'on doit s'agacer sans cesse, c'est pas une vie. Mais souvent l’agacement est un bon indice qu’il y a quelquechose d’intéressant à développer et qui manque réellement. Et oui, ça m’agace de voir des bibliothécaires acheter les livres ailleurs que chez moi en se fondant sur un service que je leur offre (mise à disposition d’un assortiment de qualité, conseils). Je me dis que ça m’agace parceque mon service n’est pas reconnu mais que j’ai dû rater quelquechose pour ne pas être partie prenante de l’achat de ce bibliothécaire. Comme souvent dans ce genre de cas, on se rend compte qu'il faut rebondir dessus et transformer la situation pour créer un service innovant, bien pensé et pratique. Créer… ensemble ?

Lully a dit…

Tout de même, les bibliothécaires qui viennent "simplement" prendre des photos d'ouvrages ne vous demandent aucun service, ne bénéficient d'aucune de vos compétences (certes riches, nombreuses et incontestables).
Et eux n'ont pas le recours, comme les libraires, de renvoyer à l'éditeur un livre qui finalement ne sort pas ou dont le contenu ne correspond pas à leur attente.

Mlle F. a dit…

ha! je le savais, faire payer un droit d'entrée est le plus efficace car on ne se rend pas compte comment on se décarcasse pour que le client ait l'impression de trouver tout seul le livre qui va bien dans une librairie qui a de la geule tous les jours ;-)

N'empêche je retiens le très bon argument qui doit en effet beaucoup peser dans vos décisions "un bon feuilletage prévient du désherbage"

Sophie Bib a dit…

à mon tour de réagir puisque vous proposez aussi de me botter les fesses ;-)
Le libraire chez qui je suis allée appartient à une chaine qui se revendiquait comme "agitateur de je sais plus trop quoi..." il y a quelques années. Je suis allée là-bas parce que le libraire local ne me proposait pas suffisamment de titres dans les domaines recherchés (normal la surface n'est pas la même), je n'avais pas besoin de conseils juste d'un choix conséquent. Nous sommes donc exactement dans la situation inverse : chercher des références dans une librairie à enseigne nationale pour ensuite commander chez le libraire local.

Je crois que vous vous trompez de procès en nous traitant d'espions (le terme est un peu violent je trouve ;-)Je suis venue voir "en vrai" des références que de toutes façons je trouve sur le net.
Les bibliothécaires restent de gros consommateurs de matière culturelle, je suis quand même ressortie de ce magasin avec 5 DVD et un livre.
Nous faire payer serait le plus mauvais choix que vous puissiez faire car vous le savez les deniers publics sont comptés et ce que vous ferez payer un de vos concurrents, dans un marché concurrentiel, risquera de le fournir gratuitement...

vous ne pouvez pas nous reprocher de chercher à rentabiliser un temps qui nous est compté, sachant que de plus en plus nous trouvons ce que nous cherchons sur la toile et ressentons de moins en moins le besoin de nous déplacer. Même problématique que la notre en bibliothèque d'ailleurs ?

Tout comme vous, nous cherchons des solutions pour garder ou faire venir de nouveaux usagers et vous avez raison sur un point, soyez sexy, prêtez-nous des lecteurs de codes-barres qui nous simplifierons la tâche et nous ferons gagner du temps car le temps est un des enjeux majeurs pour continuer à nous voir arpenter vos librairies.

Mlle F. a dit…

Dans ce sens là alors tout mon beau discours sur la compétence et la prescrition du libraire gnagnaga s'écroule, et même se retourne, misère ;-) Ou alors je m'inquiète franchement sur la qualité des titres choisis lors de cette visite ;-)... vous décriviez une situation ou vous aviez besoin d'avoir accès à un assortiment pertinent pour élaborer votre choix d'achat, j'en ai vu passer des gens qui vont dans un bon rayon bien étoffé d'une librairie indé pour ce faire, mais qui réservent leurs achats à d'autres. L'objet de mon billet n'est pas de condamner l'achat par tel ou tel canal ni la pratique d'arpenter les rayons des librairies en "simplement" ce qui est bien dans les rayons, au contraire, c'est de trouver le moyen de vous le faire faire en dépensant des sous en prime !!! Partir d'une situation basique magasin que vous décrivez et que je vis à ma manière, pour développer une recherche de solution efficace et une approche plus créative et, en effet, "fun and sexy". Promis, dès que je serai responsable collectivités d'une lib de votre région, on la mettra en place ensemble la petite bippette magique.

B&C a dit…

De l'eau à votre moulin : la seule bibliothèque dont je me sois inspiré pour des acquisitions est la BPI (pour des sujets pointus), sinon ce sont toujours de librairies, physiques ou virtuelles, qui ont servi d'inspiration à mes mes sélections.

Anonyme a dit…

Bsr. Je persiste et signe, concernant ce que je disais et que vous citez. Précision importante : relire tout l'échange pour le recontextualiser, sans quoi l'extrait n'a qu'un sens tronqué.

Mlle F. a dit…

@B&C -> il y a vraiment un truc sympa à faire avec cet usage de nos lieux, usage qui les met exactement au même niveau (bib et lib)
@dbourrion -> On parle ici de la façon de gérer l'argent public dans l'esprit d'une politique de remise exceptionnelle que l'état s'accorde sur ses achats de livres pour mise à disposition de la population... ho que je suis tentée de reprendre la discussion vive initiée par B Strainchamps, ça me gratte ! Mais j'ai bien autre chose à penser je dois dire ;-) et je pense que vous aussi, nos avis sont faits passons à autre chose !

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