lundi 25 octobre 2010

appelons-la pudiquement tradition orale

un 22 octobre à l'Assemblée nationale dans les méandres de la République...


M. Michel Herbillon. Cet amendement a plusieurs cosignataires dont Hervé Gaymard et Muriel Marland-Militello. Il concerne le taux de TVA applicable au livre numérique.
Il ne s’agit pas d’abaisser la TVA applicable au livre numérique, mais de l’établir. Le livre numérique est une œuvre de l’esprit, identique à sa version imprimée. C’est si vrai que, dans les contrats d’édition, les droits d’auteur sont calculés à l’identique pour les deux versions de l’œuvre. Il s’ensuit que le taux de TVA applicable au livre papier doit l’être également au livre numérique. À ce sujet, monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que je ne suis pas entièrement convaincu par la doctrine fiscale qui considère le livre numérique comme un fichier informatique, une prestation de service fournie par voie électronique, et justifie ainsi l’application du taux normal de 19,6 %.
L’application du taux réduit de TVA ne provoquera pas de pertes de recettes pour l’État, mais, au contraire, un gain. En effet l’application du taux normal ne permettra pas aux éditeurs de développer une offre légale attractive, et favorisera donc le piratage, par définition libre de toute imposition. L’application du taux réduit, au contraire, permettra de construire un modèle économique pérenne, fondée sur une offre légale.
M. le président. Monsieur Herbillon, il faut conclure.
M. Michel Herbillon. Avec une TVA à 19,6 %, le marché du livre numérique est inexistant ; une TVA à 5,5 % lui permettrait d’accroître ses parts de marché.
Enfin,…
M. le président. Monsieur Herbillon, je vais être dans l’obligation de vous retirer la parole.
M. Michel Herbillon. Monsieur le président, je termine.
S’agissant de la dimension européenne, les règles sont interprétées différemment selon les pays, puisque le Luxembourg applique d’ores et déjà le taux réduit. Il faut donc que nous adoptions celui-ci dès maintenant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission est confrontée à cette question depuis plusieurs années. Elle a également débattu des amendements déposés par Patrice Martin-Lalande.
Selon les règles communautaires auxquelles nous sommes assujettis en matière de TVA, tous les produits électroniques relèvent du taux normal. La directive est très claire sur ce point. Pour le livre numérique, s’il s’agit de la reproduction conforme d’un livre papier par un dispositif électronique – clé USB, CD-ROM… –, le taux réduit de TVA s’applique. S’il s’agit d’accéder au livre numérique à partir d’un site Internet, le taux normal s’applique.
Dans un État membre,…
M. Michel Herbillon. Le Luxembourg !
M. Gilles Carrez, rapporteur général. Au Luxembourg, en effet, nous savons qu’il y a des accommodements avec cette règle. Cela pose un problème, et je souhaite que le ministre nous dise ce qu’il compte faire pour régler la question de cette concurrence totalement déloyale.
M. Michel Bouvard et Mme Muriel Marland-Militello. Très bien !
M. Patrice Martin-Lalande. Ce serait une très bonne nouvelle pour la presse !
M. Gilles Carrez, rapporteur général. Enfin, pour ne pas vous faire une réponse uniquement fiscale, j’ajoute que, sur le fond, j’estime que le livre numérique devrait se voir appliquer la TVA au taux réduit. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre du budget. Monsieur le rapporteur général, qui ne le souhaiterait pas ? Il s’agit d’ailleurs de l’un des éléments de la doctrine qui permet à la France de porter une certaine idée de l’exception culturelle.
Malheureusement, pour développer de façon aussi rapide que nous le souhaiterions une telle initiative, il faut qu’elle soit conforme au droit communautaire, ce qui, aujourd’hui, n’est pas le cas. La mesure qui nous est proposée n’est donc pas eurocompatible. Cela signifie que, si d’aventure le Parlement la votait, la France serait immédiatement engagée dans un processus contentieux.
Vous évoquez le cas du Luxembourg. Je vais m’exprimer sur ce sujet avec prudence car je suis membre du Gouvernement, et je ne veux pas prendre le risque que…
M. Michel Bouvard. D’un incident diplomatique !
M. François Baroin, ministre du budget. Monsieur Bouvard, n’allons pas jusque-là : la prudence naturelle qui est la nôtre nous évite ce genre d’écueil. (Sourires.) D’ailleurs, comme vous le savez, il n’y a jamais d’incidents diplomatiques. (Mêmes mouvements.)
Les informations dont nous disposons créent ce que nous appellerons pudiquement une « tradition orale ». C’est cette tradition orale qui explique que, au Luxembourg, il n’existe pas un suivi aussi strict et rigoureux que celui qui s’appliquerait ici. Reste que, pour ce qui concerne l’application du taux de TVA, la doctrine de la Commission européenne est constante : le cas de la TVA sur la restauration en est la meilleure référence. Le président Chirac a voulu porter ce dossier. Il aurait pu ouvrir le débat et faire adopter dans la foulée le taux réduit au Parlement. Mais si tel avait été le cas, les compteurs se seraient immédiatement mis à tourner dans l’addition des pénalités qui auraient été imposées à la France. C’est la raison pour laquelle le Président Sarkozy, une fois élu, a porté cette demande auprès de la Commission. Et c’est uniquement à l’issue d’un accord avec l’Allemagne que ce dispositif a pu être validé. Mais si d’aventure, le Parlement avait voté une telle initiative, la France aurait été immédiatement condamnée, et à de lourdes pénalités.
Nous sommes exactement dans le même schéma aujourd’hui : nous sommes d’accord sur le fond, nous entendons évidemment les arguments qui vont dans le sens de cet amendement. Il n’y a pas, d’un côté, les défenseurs de l’exception culturelle et, de l’autre, les vilains canards seulement préoccupés par les soustractions et totalement insensibles au développement de l’accès au livre grâce aux nouvelles technologies. Le problème est ailleurs : il s’agit de la stricte application du droit communautaire et d’une jurisprudence constante pour ce qui touche à la TVA, sur ce type de produits comme sur les autres. Je vous demande donc, naturellement, d’entendre cet argument.
M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy.
M. Lionel Tardy. Je profite de cet amendement pour poser un certain nombre de questions qui méritent notre attention sur ce sujet du livre numérique.
Cet amendement propose d'accorder le bénéfice de la TVA à 5,5 % pour le livre numérique dit « homothétique », c’est-à-dire une version numérisée en format PDF d'un livre relié. Cette définition fiscale du livre numérique me pose problème, car le passage au numérique, pour l'édition, ne se limite pas à numériser un livre, loin de là.
Le numérique, ce n'est plus la vente d'un produit ; c’est la vente d'un contenu, un contenu qui peut prendre plusieurs formes. Bien entendu, cela peut prendre la forme d'un texte brut, mais c'est le produit le plus basique et le plus bas de gamme.
Le numérique permet la création de contenus multimédias, c’est-à-dire mixant à la fois l'écrit, le son, l'image animée, la vidéo. Les potentialités sont énormes.
En accordant un avantage fiscal à un seul produit de la gamme, on va freiner le développement des autres produits, qui sont justement ceux qui ont la plus forte valeur ajoutée. On crée également une distorsion de concurrence, qui n'apparaît pas justifiée du point de vue du numérique.
Qu'est ce qu'un livre numérique ? C’est là la question. À mon avis, cela n'existe pas, et il faut arrêter de penser le numérique en fonction des supports physiques. Le monde de l'édition est dans la même situation que celui de la musique. Sur internet, il ne vend pas un produit, il apporte de la prestation intellectuelle. Cela ne se valorise pas et ne se vend pas de la même manière. Il y a un deuil à faire : les anciens modèles commerciaux n'étant pas opérants sur Internet, il faut que les industries culturelles s'adaptent. Elles n’auront pas le choix, car ce n'est certainement pas le monde du numérique qui s'adaptera à leurs pratiques et à leur organisation économique. Je suis donc contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Monsieur le ministre, nous avons bien entendu l’argument de l’eurocompatibilité. Les parlementaires qui suivent les débats budgétaires y sont du reste habitués ; cela nous a même parfois incités à aller pêcher l’information à la source et à demander au commissaire européen chargé de ces questions de nous confirmer si telle ou telle disposition que nous envisagions de proposer était eurocompatible ou pas…
Or que constatons-nous aujourd’hui ?
Premier constat : des plateformes d’éditeurs français se sont installées au Luxembourg pour bénéficier de cette facilité.
Deuxième constat : à ce jour, les autorités communautaires n’ont engagé aucune procédure contre le Luxembourg. S’il y avait un vrai problème, ce serait chose faite depuis longtemps.
Troisième constat : une proposition de loi a été déposée conjointement à l’Assemblée et au Sénat sur la clarification du taux de TVA applicable au livre sous sa forme numérique, avec l’accord du ministère de la culture et le soutien du Gouvernement.
Nous ne pouvons pas en rester au statu quo. Nous sommes obligés de bouger, parce qu’il y a des enjeux en termes de métiers culturels et de créations d’emplois. On ne peut pas, d’un côté, lutter contre la délocalisation, par exemple, des plateformes d’appel, et de l’autre, laisser les plateformes des éditeurs s’installer au Luxembourg comme si de rien n’était, au prétexte que nous avons un problème de distorsion de concurrence.
J’ai connu la Commission plus dynamique sur les problèmes de distorsion de concurrence. Et à chaque fois que les autorités françaises ne se sont pas battues, nous avons été perdants – j’ai encore l’exemple de Péchiney en tête…
M. le président. La parole est à M. Michel Herbillon.
M. Michel Herbillon. Monsieur le ministre, si je vous ai bien entendu bien, nous sommes d’accord sur le fond. Nous sommes attentifs, comme vous, aux déclarations du Président de la République, qui, à l’occasion de ses vœux au monde de la culture, a souhaité que le taux réduit soit généralisé. Nous sommes attentifs, comme vous, à l’exception culturelle. Nous l’avons toujours défendue. C’est une sorte d’apanage de notre pays, et je sais, monsieur le ministre, pour bien vous connaître, que vous y êtes sensible. Mais au bout du compte, on évoque la question de l’eurocompatibilité. Or, de mon point de vue, ce n’est pas le même sujet que le taux de TVA sur la restauration.
Deuxièmement, M. Bouvard vient de le dire, les éditeurs, aujourd’hui, éditent au Luxembourg, ce qui entraîne une évasion fiscale. Le problème qui se pose, c’est que les règles européennes ne sont pas claires, et sont appliquées de façon variable selon les pays, ce qui pénalise la France comme cela pénalise l’œuvre de l’esprit qu’est le livre numérique.
Je souhaite qu’à tout le moins, monsieur le ministre, dans votre sagesse, vous preniez une autre position que celle que vous venez d’exprimer.
M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.
M. Patrice Martin-Lalande. C’est un peu le même problème que celui que nous allons examiner tout à l’heure s’agissant du taux réduit applicable à la presse en ligne. Nous connaissons les contraintes, monsieur le ministre. Ce que nous voudrions savoir, c’est si le Gouvernement et le Président de la République vont s’engager à ce que tout soit mis en œuvre au niveau européen pour sortir de cette situation. S’il n’y a pas un engagement, une volonté française, puis une volonté européenne, jamais nous n’en sortirons – voyez ce qu’il en a été avec la restauration. Pouvez-vous nous assurer que le Gouvernement et le Président de la République veulent s’engager dans cette voie, aussi bien pour le livre que pour la presse ?
Nous ne voulons pas engager le pays en adoptant une disposition qui nous mettrait en infraction et nous ferait encourir des pénalités. Ce serait le contraire de ce que nous recherchons ; mais au moins aurions-nous la certitude que le Gouvernement et le Président de la République sont en marche pour essayer d’obtenir cette amélioration réellement indispensable.
M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.
M. Patrick Bloche. Je suis étonné d’entendre le Gouvernement et le rapporteur général se retrancher derrière l’argument de l’eurocompatibilité : je me souviens, même si ce n’est pas le même sujet, que lorsque la taxe télécom a été mise en place pour financer le manque à gagner en recettes publicitaires de France Télévisions et que la Commission européenne a dit que cette taxe n’était pas eurocompatible, le Gouvernement a carrément choisi de passer en force en attendant la décision de la Cour de justice des communautés européennes… Autrement dit, je vous sens beaucoup plus volontaire face aux contraintes européennes lorsqu’il s’agit de France Télévisions que lorsqu’il s’agit d’adopter un taux de TVA réduit sur le livre numérique !
De même, j’ai encore dans l’oreille, comme beaucoup de nos collègues, un des arguments que le Gouvernement avait avancés pour défendre la mauvaise loi HADOPI : il faut à tout prix qu’une offre légale attractive se développe, pour éviter le téléchargement illégal. Or l’occasion nous est offerte à l’instant d’exprimer une volonté politique – et ce pour un bien qui n’est pas un bien marchand comme un autre, puisqu’il s’agit du livre –, de développer une offre légale attractive, tout en évitant la délocalisation au Luxembourg – ce dernier point a déjà été développé, je n’y reviens pas. Ce taux de TVA réduit à 5,5 % serait un signe fort : le livre papier et le livre numérique doivent avoir le même traitement Nous en reparlerons à propos du prix unique du livre numérique.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre du budget. Premièrement, cher Michel Herbillon, la réalité, c’est que les autorités luxembourgeoises adressent à la Commission des textes qui fixent leur doctrine en la matière, à savoir l’application du taux qui est le leur – 15 %, le plus bas de l’Union européenne. Cela, c’est la doctrine officielle. Ensuite, les entreprises qui s’installent là-bas, je le dis avec tout le sens de l’équilibre dont je suis capable, prennent et assument leurs risques, selon ce qu’on leur aura dit oralement. Formellement, dans l’application des textes, il n’y a pas de décalage profond entre ce qui se passe au Luxembourg et dans les autres pays de l’Union…
M. Michel Bouvard. Ah bon !
M. François Baroin, ministre du budget. …mais dans l’application, il est de notre responsabilité de dire que les entreprises qui vont au Luxembourg prennent leurs risques.
Deuxièmement, il est acquis que, à partir du 1er janvier 2015, ce problème de territorialité sera réglé par une nouvelle directive.
M. Patrice Martin-Lalande. Quatre ans, c’est long…
M. François Baroin, ministre du budget. Autrement dit, dans le domaine des prestations électroniques, le choix de se domicilier dans un autre État de l’Union n’apportera aucun bénéfice.
Troisièmement, M. Bloche a parlé d’une taxe. Moi, je vous parle de la directive communautaire sur la TVA. Ce n’est pas de la même nature.
M. Patrick Bloche. Je vous l’accorde.
M. François Baroin, ministre du budget. Je veux vraiment que l’on prenne la mesure du risque que nous ferions courir à nos entreprises.
Quatrièmement, j’ai en mémoire, comme beaucoup d’entre vous, ce que l’on avait appelé le plan Borotra. Ce dispositif d’exonération de charges sociales sur les salaires allant jusqu’à une fois et demie le SMIC visait notamment à aider les industries de main-d’œuvre, en particulier celles du textile, qui étaient lourdement touchées. Il s’agissait d’un secteur important, menacé, susceptible d’être affecté par des délocalisations massives ayant un impact très fort sur l’emploi. Ce dispositif intelligent, pertinent, répondait à un réel souci de protéger nos outils de production sur site. À quoi a-t-on abouti ? À la remise en cause de ce dispositif par la Commission européenne, à des pénalités pour le pays, et à une demande de remboursement par les entreprises. La double peine, en somme ! Il ne faut pas l’oublier. Nous nous en souvenons, et c’est le devoir du Gouvernement de faire preuve d’esprit de responsabilité.
La France a été aux avant-postes, il y a quelques années, du développement de l’exception culturelle, et de la conquête – car c’était une conquête – qui a consisté à considérer que le livre ne pouvait pas être une marchandise comme les autres. Nous sommes dans le même esprit. Le Président de la République a déjà pris des engagements. Comme par le passé, la France sera fidèle à cette tradition. Et connaissant le degré de l’implication personnelle du Président de la République sur ce sujet, je n’ai aucun doute qu’il portera le plus haut possible cette demande auprès des instances communautaires. Voyez-y, mesdames, messieurs les députés, un engagement.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.
M. Jérôme Chartier. Je crois devoir donner la position du groupe UMP, après les arguments que vient de développer le ministre.
M. François de Rugy. Laissez vos collègues voter librement !
M. Jérôme Chartier. Effectivement, le risque est grand de nous voir encourir la double peine : premièrement, une perte de recettes – assumée, pour encourager la culture –, deuxièmement surtout, les pénalités que ne manquerait pas de nous infliger la Commission européenne. Faisons un petit effort de mémoire, mes chers collègues, et souvenons-nous des péripéties auxquels ont donné lieu les dispositifs de réduction de TVA : le ministre a rappelé à juste titre ce qu’il en a été pour la réduction de la TVA sur la restauration.
M. Michel Bouvard. Cet amendement ne propose pas une réduction, mais une création.
M. Jérôme Chartier. Il n’y existe pas de précédent où l’Assemblée nationale aurait décidé de s’engager de but en blanc dans une réduction de la TVA, sans qu’il y ait eu une démarche concertée engagée par le Gouvernement au niveau européen…
M. Michel Bouvard. Mais ici, il ne s’agit pas de réduction !
M. Jérôme Chartier. …sachant que toute modification en matière de TVA suppose une décision des instances européennes. Cela ne saurait relever, et Michel Bouvard le sait bien, d’une initiative de l’Assemblée nationale sans engagement préalable d’une concertation très précise au niveau européen.
Il ne peut y avoir que deux solutions – et la décision, finalement, appartient à Michel Herbillon.
La première consiste naturellement à mettre cet amendement aux voix.
M. Patrick Bloche. Oui, votons !
M. Jérôme Chartier. Si tel est le cas, nous serons gênés : pour ma part, je m’opposerai à cet amendement alors même que je souhaite encourager la culture (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC) et qu’il me semble logique, comme l’a dit le rapporteur général, que le livre numérique se voit appliquer le même taux de TVA que le livre imprimé vendu en librairie. Je voterai contre cet amendement parce que je connais les contraintes du Gouvernement vis-à-vis de l’Union européenne et qu’il me paraît prématuré de légiférer en la matière.
Mme Christiane Taubira. Toujours la même chanson !
M. le président. Il faut conclure, monsieur Chartier.
M. Jérôme Chartier. La deuxième solution consiste à inviter Michel Herbillon à redéposer son amendement dans le cadre de la loi de finances rectificative qui sera discutée dans quelques semaines. (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC.) Entre-temps, il pourra être procédé à un vrai travail de concertation entre notre collègue et le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Gilles Carrez, rapporteur général. Patrick Bloche a dit que le Gouvernement avait pris le risque de passer en force en attendant la décision de la Cour européenne de justice pour la taxe sur les fournisseurs d’accès à Internet. Mais à mes yeux, ce n’est pas du tout la même chose : la TVA est régie par une directive communautaire extrêmement précise prévoyant le déclenchement automatique de sanctions.
M. Michel Bouvard. Il n’y a pas de sanctions vis-à-vis du Luxembourg !
M. Gilles Carrez, rapporteur général. Jamais depuis 2002 – depuis que je suis rapporteur général –, je dis bien jamais nous n’avons adopté un amendement contrevenant à cette directive européenne. Nous devons continuer à faire très attention. Comme l’ont dit Jérôme Chartier et Michel Bouvard, la bonne démarche consiste à ce que le Gouvernement s’engage à porter ce dossier.
En tout état de cause, voter un tel amendement serait contre-productif sur le plan juridique. La TVA est un sujet que nous connaissons malheureusement très bien : nous avons déjà débattu de la TVA sur la restauration, mais aussi sur des sujets plus mineurs – notamment sur les travaux de déneigement, où nous avions reçu une lettre de commissaire européen Laszlo Kovacs.
M. Michel Bouvard. En effet.
M. François de Rugy. Hier, c’était la neige pour les skieurs, aujourd’hui le déneigement… Il n’y en a que pour la montagne !
M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je demande par conséquent à nos collègues de nous suivre dans la direction que vient d’indiquer excellemment Jérôme Chartier, et que je confirme.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre du budget. J’ai déjà évoqué l’engagement personnel du Président de la République dans cette affaire. Je peux également prendre l’engament personnel devant la représentation nationale d’écrire au président de la Commission, à l’issue du vote de la première partie de la loi de finances, afin d’attirer son attention sur le système de concurrence déloyale qui est en train de se mettre en place, et de lui demander un examen plus approfondi de la sincérité et de l’équilibre des positions de chacun sur des questions que nous estimons prioritaires : le développement de l’exception culturelle, l’égal accès à la culture pour tous et l’application des directives communautaires dans ce domaine.
M. le président. La parole est à M. Michel Herbillon.
M. Michel Herbillon. Compte tenu des engagements très clairs que vient de prendre le ministre…
M. François Pupponi. Sera-t-il encore ministre dans quinze jours ?
M. François Baroin, ministre du budget. Dans quinze jours, je pense que oui !
M. Michel Herbillon. …et compte tenu de la possibilité qui m’est donnée de déposer à nouveau mon amendement lors de la loi de finances rectificative, je vais retirer cet amendement.
M. Patrick Bloche et M. François Pupponi. Nous le reprenons !
M. Michel Herbillon. Je précise toutefois que cet amendement reprend une proposition de loi que j’ai cosignée, notamment avec mon collègue Hervé Gaymard, et que nous n’entendons pas baisser les bras dans ce combat de l’exception culturelle, qui est l’apanage de la France…
M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous l’avons bien compris !
M. Michel Herbillon. …un combat qui se trouve en pleine résonance avec les engagements pris par le Président de la République lors de ses vœux au monde de la culture.
Je dois vous dire, monsieur le ministre, qu’en ce qui concerne le livre numérique, nous n’attendrons pas aussi longtemps que nous avons dû le faire pour le taux de TVA sur la restauration.
M. François Pupponi. Parlons-en !
M. Michel Herbillon. Le monde du numérique va vite, plus vite que l’Europe et comme le dit un excellent proverbe chinois : « Il est plus tard que tu ne crois ».
M. le président. J’ai bien noté que l’amendement n° 286, retiré par M. Herbillon, a été repris par M. Bloche.
(L'amendement n° 286, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Suspension et reprise de la séance
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à onze heures cinquante.)

Extrait de : http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2010-2011/20110023.asp
En vidéo : http://www.assemblee-nationale.tv/chaines.html?media=1677#

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